mercredi 6 avril 2016

A la mesure de nos silences

4e de couverture: Jamais Antoine n'aurait pensé que son grand-père puisse agir ainsi : il y a quelques heures à peine, l'adolescent sortait du lycée, s'apprêtant royalement à rater son bac. Kidnappé par papi à bord d'un vieux coupé Volvo, il roule à présent vers l'inconnu, privé de son iPhone.
À 82 ans, François Valent, journaliste brillant, aura parcouru le monde et couvert tous les conflits du globe sans jamais flancher. S'il a conclu un marché avec son petit-fils, c'est pour tenter de le convaincre de ne pas lâcher ses études.
Mais ce voyage improvisé ne se fera pas sans heurts. La destination vers laquelle le vieil homme conduit Antoine – la ville de Villefranche-de-Rouergue, ou il a grandi – a ce parfum particulier du remords. C'est là que l'enfance de François a trébuché. Lors d'un drame sanglant de la Seconde Guerre mondiale dont l'Histoire a gardé le secret.

À la fois quête du souvenir et voyage initiatique, cette échappée belle les révèlera l'un à l'autre. La vraie vie n'est jamais là ou on l'attend.

Il arrive souvent que ce soit la couverture d'un livre qui nous attire et nous fait le choisir. C'est ce qui m'est arrivé avec le roman de Sophie Loubière: A la mesure de nos silences. (j'en avais d'ailleurs discuté avec elle lors de notre rencontre au Salon du Livre, l'année dernière). 

Un an après, j'ai (enfin) sorti ce livre de ma PAL (alors que j'en avais fait une "lecture prioritaire", c'est dire!), comme un appel de sa part (oui, je fonctionne de temps en temps comme ça. Je suis attiré comme un aimant vers un livre et c'est ce qui s'est passé pour celui ci). 

A la mesure de nos silences fut une véritable claque. J'ai été époustouflé par ce livre, happé, mais prenant mon temps pour en comprendre toutes les subtilités. Cette virée entre un grand-père et son petit fils, sur les routes du passé ne pouvait que me plaire et bousculer mon esprit. Sophie a su très bien mener son intrigue (en même temps, c'est une auteure de thriller, donc, elle a la technique pour capter l'attention du lecteur) mais c'est la psychologie des personnages, très bien fouillée, qui fait toute la différence. Sophie a ce don d'aller au fond des âmes pour en faire ressortir toute leur substance. 
Surtout, elle a réussit haut la main à s'approprier une période mille fois traitée (la Seconde Guerre mondiale) en littérature, en se basant sur un fait divers, mais surtout sur des faits peu connu (le fait que des musulmans croates (en ce qui concerne le roman) aient fait parti des SS, par exemple. Sur ce coup, j'ai été aussi surpris qu'Antoine). 

Par une technique d'alternance des points de vue dans un même chapitre (l'on passe à l'aide de  sous-chapitre, de François (le vieil homme) à Antoine (son petit fils) pour arriver à un pan du passé, qui nous rappelle les éléments de ce fait-divers, qui s'est déroulé à Villefranche-de-Rouergue, dans les années 40), Sophie Loubière maintient l'intérêt du lecteur, qui a envie de savoir ce qui s'est passé dans ce village, au moment de la seconde guerre mondiale...et j'ai été surpris de bout en bout. 
Mais, il n'y a pas que cela qui retient l'attention, il y a aussi la relation entre le grand-père et son petit-fils: tous deux se connaissent mal en définitive, ils ne se voient que pour les fêtes, une ou deux fois dans l'année. Quand François apprend, de la bouche de son ex-belle-fille que son petit fils à des soucis, il décide de le "kidnapper" afin de lui apprendre une partie de son passé. Les silences vont laisser place aux confidences, et ces deux là vont commencer à se comprendre. Surtout, Antoine, va ouvrir les yeux sur ce grand-père qu'il ne connait pas bien et sa vision des choses va progressivement évoluer. 

Voilà un roman captivant, qui nous tient en haleine par une intrigue fort bien menée, mais aussi un roman touchant, qui prend le temps de nous montrer toutes les nuances de la vie. Certains passages sont de vrais poèmes, et la plume de Sophie Loubière se fait subtile, laissant le temps s'écouler lentement, pour ensuite, revenir à une écriture plus rythmée. 
Cette dualité de style fait toute la singularité de ce roman, qui, de par son sujet, nous fait nous interroger sur notre passé et sur nos rapports avec nos proches. 
Un roman étonnant que je conseille à tous, et surtout aux jeunes lecteurs. Celui ci revient sur un événement de notre histoire, peu connu, mais surtout, ils nous fait nous questionner sur ce qu'est le passé et surtout le passage de témoin entre les générations. Un livre à lire absolument et à faire lire à vos enfants. 
Pour ma part, je retrouverai avec plaisir la plume de Sophie Loubière, pour continuer à découvrir son univers. En tout cas, j'ai été conquis par A la mesure de nos silences. Un livre qui reste en mémoire, longtemps après avoir tourné la dernière page. 

Sophie Loubière: A la mesure de nos silences: Fleuve Editions, 302 pages, 2015



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